Jeu: The floor is jelly

Alors que ce blog prend une tournure un peu geek ces derniers temps, j’en profite pour vous présenter un vrai coup de coeur vidéo-ludique de ces derniers mois: The Floor is Jelly, d’Ian Snyder, avec Disasterpeace au sound design (on en reparlera). Pour 9,99$, vous achetez environ quatre heures de jeu, ce qui est honnête quand on le rapporte à ma référence personnelle, les cinéma qui projettent des films de 2h10 à 13,50€.

Le principe est simple et de ceux qui font, à mon avis, les meilleurs jeux: plonger le joueur dans un environnement dont il connaît les codes... presque tous les codes. The Floor is Jelly choisit de poser la question: et si le sol était fait de gelée ?


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Le gameplay est simple, surtout si vous avez des bases en Super Meat Boy: on court, on saute, on rebondit ou on glisse le long des murs. Sauf que la gelée permet de transformer n’importe quelle surface plane en trampoline: hé oui, la gelée, ça se déforme.

Fausse originalité mais vraie réussite à mon sens: le jeu ne vous donne pas la moindre indication sur ce que vous devez faire, et vous amène parfois dans des endroits où vous n’êtes là que pour admirer le paysage (les maisons). The Floor is Jelly choisit de ne pas prendre le joueur par la main, mais de le forcer à entrer dans sa propre logique, et ça, j’adore. Pas de tutoriel lourdingue: pour apprendre à sauter, c’est une grenouille qui vous montre le principe du rebond sur la gelée. Subtil, élégant et, oui, avec une grosse courbe d’apprentissage, parce que certains sauts sont vraiment difficules. Préparez-vous à expérimenter de la frustration, à refaire un niveau des dizaines de fois, mais jamais, oh grand jamais, le jeu ne vous autorise à arrêter. On n’a qu’une seule envie: découvrir le tableau suivant, découvrir ce que le designer a imaginé faire subir à cette pauvre gelée.

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Les chemins à suivre ne sont donc pas évidents: on progresse de fenêtre en fenêtre, celles encore non explorées étant entourées d’étoiles. Dans les souterrains, l’objectifs est de finir trois mondes éclairant les trois hublots d’une porte. Parfois, vous récolterez de grands rubans tourbillonnants qui ouvriront des portes de hobbits. Et vous pousserez un soupir de soulagement en apercevant les cabines téléphoniques anglaises façon Dr Who: c’est la fin du niveau ! Pas de narration comme dans Monument Valley, mais une esthétique irréprochable, créative, et des plateformes juste un peu trop lointaines, qui vous forceront à trouver une autre approche.

Le gameplay se renouvelle sans cesse, et c’est un exploit sachant que le jeu n’utilise que trois touches. Le niveau de l’eau inverse la gravité et vous force à retourner mentalement vos contrôles; le niveau de l’espace est au contraire en gravité réduite; l’infernal niveau positif/négatif est sublime mais à s’arracher les cheveux; enfin, le niveau de la pluie, outre une ambiance magnifique (ma préférée avec l’espace), vous demandera réflexion et compréhension des objectifs (indice: les chats n’aiment pas l’eau, mais les fleurs blanches si). Car, je le répète, ce jeu ne prend pas le joueur par la main et lui demande quelques qualités de persévérance, parfois pour une récompense purement esthétique.

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Le sound design est lui un chef-d’oeuvre. Sans être énervants, les sons créent une sorte de bulle enveloppante propre à chaque monde, et la musique se construit au fil des tableaux. Enfin, le niveau de l’espace se parcourt dans le silence le plus complet. Du jamais vu. Croyez-moi si je vous dit que la première fois qu’on le teste, l’ambiance est unique ! Jouer dans le silence... à essayer si vous êtes chez vous, un soir, au calme, pour un effet maximal !

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Enfin, et c’est la partie que j’ai absolument adorée, The Floor is Jelly n’est pas seulement un jeu à l’esthétique irréprochable (ce qui aurait pourtant suffit), c’est aussi une réflexion sur ce qu’est un jeu. Dans les deux derniers mondes, le jeu commence à « bugger », la musique saute, grésille, les sons sont sales, les plate-formes commencent à adopter des comportements erratiques, au point que dans le tout dernier monde, les sons se bloquent et il devient quasiment impossible de jouer tant les plate-formes sont folles (je ne vous mets pas d’image exprès, il faut le voir pour comprendre).

The Floor is Jelly pousse à l’extrême son parti-pris initial, jusqu’à en montrer l’absurdité et à rappeler pourquoi les jeux vidéos doivent obéir à certaines règles. Malgré quelques longueurs sur le dernier monde qui rendent la démonstration un peu pesante, le joueur comprend en jouant l’intention artistiques du designer, jusqu’à avoir l’impression de suivre une explication par l’absurde de la manière dont on créé un jeu.

Si vous ne croyez pas qu’un jeu peut être divertissant tout en réfléchissant sur sa propre nature... testez The Floor is Jelly !

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